Procès de la soumission chimique : appels à manifester samedi en soutien à Gisèle Pelicot et à « toutes les victimes de viols »
Une mobilisation est prévue à 14 heures place de la République à Paris, et plus d’une vingtaine d’autres sont également organisées « à travers toute la France », en solidarité avec Gisèle Pelicot, victime de viols commis par des inconnus pendant dix ans, orchestrés par son mari qui la droguait.
« Choisissez votre camp, rejoignez-nous » : militantes et associations féministes appellent à manifester samedi en France en soutien à Gisèle Pelicot, victime de viols commis par des inconnus recrutés sur Internet par son mari pendant dix ans, et plus largement à toutes les victimes de viols. Le procès s’est ouvert la semaine passée devant la cour criminelle de Vaucluse.
Des rassemblements sont prévus « à travers toute la France », « en soutien à Gisèle Pelicot et à toutes les victimes de viol », a indiqué mercredi sur son compte Instagram la militante féministe Anna Toumazoff, à l’origine de la mobilisation avec les autres activistes Blanche Sabbah (@lanuitremueparis) et Mathilde Caillard (@mcdansepourleclimat).
À Paris, un rassemblement est prévu à 14 heures samedi place de la République. Lors de cette mobilisation, le collectif #NousToutes fera sonner une alarme toutes les 2 minutes 30, la fréquence moyenne à laquelle se déroulent les viols en France (selon un rapport VRS), indique le collectif au Parisien.
Plusieurs autres mobilisations sont prévues dans le reste du pays : plus d’une vingtaine de villes sont déjà concernées, listées en description de la publication qui sera mise à jour « au fur et à mesure ». Une carte a aussi été mise en ligne pour centraliser tous les appels.
De nombreux rassemblements sont ainsi prévus à 14 heures également : devant le Palais de justice de Marseille (Bouches-du-Rhône), sur la place de l’Hôtel de Ville de Bordeaux (Gironde), au niveau de l’arrêt Jean-Jaurès à Toulouse (Haute-Garonne), sur la place Bouffay à Nantes (Loire-Atlantique), sur la place de la République de Rennes (Ille-et-Vilaine), sur la place Bouchard à Caen (Calvados), à la place de la Comédie de Montpellier (Hérault)…
Des mobilisations sont aussi attendues à 11 heures sur la place Massena de Nice (Alpes-Maritimes) et devant le Palais de Justice de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), à 13 heures porte Limbert à Avignon (Vaucluse), à 15 heures sur la place de Jaude à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), à 17 heures sur la place Jean-Jaurès de Tours (Indre-et-Loire) ou encore à 10 heures d’Ajaccio et 18 heures à Bastia (Corse), à chaque fois devant le Palais de Justice. Un rassemblement est aussi prévu à 18 heures dans le cadre de la Fête de l’Humanité au Plessis-Pâté, en Essonne.
« Les auteurs sont vos amis, vos maris, vos frères, vos grands-pères »
Quelques jours plus tôt, Anna Toumazoff avait rappelé dans un précédent message sur Instagram que « 91 % des viols surviennent dans l’entourage ». « Les victimes sont vos amies, vos femmes, vos sœurs, vos mères, vos grands-mères. Les auteurs sont vos amis, vos maris, vos frères, vos grands-pères. Ça vous touche, dégoûte, scandalise, révolte ? Ne soyez pas comme ceux qui n’ont rien dit, choisissez votre camp, rejoignez-nous », avait-elle interpellé.
Contacté mardi, le collectif féministe #Noustoutes et La Fondation des Femmes ont indiqué à l’AFP se joindre à cet appel aux rassemblements. La Fondation des Femmes a depuis partagé un appel à la mobilisation ce samedi sur son compte Instagram, « en soutien à toutes les victimes de violences sexuelles ». « #MeToo continue et tant qu’il le faudra. Combien d’affaires faudra-t-il pour prendre les victimes au sérieux ? Combien d’affaires faudra-t-il pour que l’impunité cesse ? Face à cela, notre détermination est toujours plus forte. Et nous sommes des millions », a écrit l’association en légende.
Au Parisien, #Noustoutes souligne que « l’affaire Pelicot constitue un exemple révoltant des défaillances structurelles et de la complicité de notre gouvernement qui ne prévient pas suffisamment les violences et ne protège pas les victimes, alors que les associations féministes militent depuis des dizaines d’années pour des politiques publiques adaptées et un budget d’au moins 2,6 milliards d’euros », citant le rapport de la Fondation des Femmes de septembre 2023.
« Nous voulons être en sécurité avant d’être mortes »
Au total, près de dix organisations soutiennent la mobilisation, dont le Planning familial, En avant toute(s) et le Collectif national pour les droits des femmes, selon une publication de la militante féministe et autrice de BD Blanche Sabbah, qui a appelé à se rendre « tous et toutes dans la rue ».
L’appel à manifester a été relayé jeudi dans une tribune publiée sur le site de Libération, signée par les trois militantes à l’origine de la mobilisation mais aussi une vingtaine de personnalités, dont l’universitaire Camille Kouchner, l’autrice de BD Pénélope Bagieu, la militante écologiste Camille Étienne, l’actrice Anna Mouglalis, les réalisateurs Andréa Bescond et Cyril Dion, les journalistes Giulia Foïs, Nesrine Slaoui, Victoire Tuaillon et Mehdi Maïzi, les chanteurs Yelle et Pierre de Maere.
« Violences intrafamiliales, soumission chimique, impunité des prédateurs sur Internet, inceste, viol conjugal, errance médicale, entourage et voisinage complices : l’affaire Pélicot est emblématique du caractère massif et banal des violences qu’il faut combattre urgemment », dénoncent-ils, soulignant la « triste banalité du profil des hommes derrière les viols ». « Maintenant, il faut des actes », exhortent-ils.
« Nous appelons à une mobilisation qui parte du calvaire de Gisèle Pélicot, mais ne s’y limite pas. Nous appelons les hommes à se soulever avec nous, à ne plus rester au mieux passifs, au pire complices », insiste aussi la tribune. Elle fustige par ailleurs « l’inaction du pouvoir politique » et demande « une loi intégrale pour en finir avec les violences sexistes et sexuelles », comme l’avaient exigé en mai dernier 100 personnalités. Ils exhortent aussi à faire voter dans le budget de l’État « 2,6 milliards pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles ». « Nous voulons être en sécurité avant d’être mortes. Nous voulons vivre, libres », conclut le texte.
Cet appel à manifester n’est pas la première initiative lancée en solidarité avec Gisèle Pelicot : l’ex-star de téléréalité et influenceuse Nabilla Benattia avait ouvert la semaine passée une cagnotte pour « participer aux frais de justice (de la victime) et à l’aider à traverser cette terrible épreuve », avant que cette dernière ne demande finalement à la fermer. « Madame Gisèle Pelicot et sa famille remercient toutes les personnes qui ont envoyé massivement du monde entier des témoignages de soutien depuis le début du procès », ont toutefois indiqué leurs avocats.
Le procès des viols de Mazan a débuté le 2 septembre à Avignon et devrait durer jusqu’en décembre. Dominique Pelicot est accusé d’avoir violé et fait violer pendant dix ans celle qui est désormais son ex-épouse, par des dizaines d’hommes qu’il recrutait sur Internet. L’ex-mari, malade, ne participe pas à l’audience depuis plusieurs jours, et son absence risque de se prolonger, faisant craindre au président de la cour criminelle de Vaucluse un nouveau report des débats.
En début de semaine, l’un des avocats de la défense, dont les clients affirment qu’ils n’avaient pas eu « l’intention » d’abuser de la victime, avait déclenché la colère des parties civiles en affirmant qu’il « y a viol et viol », et que « sans intention, il n’y a pas de viol ». « C’est la honte pour la justice ! », a notamment lancé Caroline, la fille de Gisèle Pelicot.